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Environnement: Au Niger: Sur le plateau de Kouré, comment les terres récupérées facilitent la restauration de l’environnement

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Pays de l’Afrique de l’Ouest, le Niger est depuis plusieurs années frappé par des évènements de sécheresse et d’inondations. Le pays perd 100 000 ha de terres agricoles par an. Avec les chocs climatiques, la dégradation croissante des terres, des forêts et des paysages s’accentue et impacte durement les populations rurales déjà confrontées aux conflits et à la pauvreté.  Mais, à Kouré, une commune à l’est de Niamey, la capitale nigérienne, la technique des demi-lunes permet de récupérer les terres dégradées et de développer la biodiversité.

lancement des travaux de récupération des terres sur le site de kouré au titre de l’année 2024 par l’ASGN

Les sécheresses, au Niger, surviennent tous les deux ans sur cinq. Avec la faible fertilité des sols, la population rurale est maintenue en état de vulnérabilité incessante.  Âgé d’une quarantaine d’années, Seydou Hassan, marié et père des sept (7) enfants est conscient de cette situation : « Je suis un paysan mais de par mon expérience, je sais que la dégradation des terres à un impact réel sur la sécurité alimentaire. Tout celui qui a plus de trente (30) ans peut témoigner l’écart de production constaté entre les années antérieurs et ces dernières années ». Le cas de Seydou traduit bien la réalité des agriculteurs du sud-ouest du Niger. Le manque de terres cultivables, exacerbé ces dernières années par les irrégularités saisonnières observées dans cette zone semi-aride, fait naître les conflits. Jadis alliés, agriculteurs et éleveurs sont aujourd’hui en situation de concurrence. A l’instar de beaucoup de pays du Sahel, la désertification et l’épuisement des sols menacent en permanence la sécurité alimentaire surtout des populations rurales au Niger. Le constat est sans appel. Pour l’environnementaliste Maman Moctar, les problèmes sont à plusieurs niveaux. « Certaines pratiques des paysans les maintiennent dans un cercle fermé. Par exemple, les arbres sont constamment coupés pour faire place à des champs de culture et aussi pendant la saison sèche, les résidus des cultures sont ramassés pour des usages domestiques. Cela fait aussi en sorte que la terre n’est pas fertile et la production est en baisse chaque année ».

Pour lutter contre la sécheresse, le Niger a élaboré pour la première fois le plan national de l’Environnement pour un développement durable (PNEDD) en 1995. Par ailleurs, dans le document cadre de politique nationale de décentralisation (DCPND), l’environnement fait partie des services transférés aux communes. Ainsi, le cadre stratégique de gestion durable des terres (CS-GDT) « sur dix ans pour la période 2020- 2030 » prévoit la restauration de 1 030 000 ha terres agro-sylvo-pastorales, la régénération naturelle assistée sur 1 100 000 ha, la fixation des dunes sur 550 000 ha, l’aménagement des forêts naturelles sur 2 220 000 ha, la création de 145 000 kms de haies-vives, la plantation d’espèces à usages multiples sur 750 000 ha, les plantations de Moringa oleifera sur 125 000 ha, l’ensemencement des parcours sur 304 500 ha et la promotion de la foresterie privée sur 75 000 ha. Dans cette optique, les agriculteurs sont initiés à de nouvelles techniques agricoles pour planifier l’utilisation des terres et protéger la biodiversité.  La récupération des terres à travers les demies lunes

Impliquer les communautés

A Kouré, un village situé à plus de 60 km de la capitale Niamey, se dresse depuis plus de 20 ans, la zone des girafes. Cette localité dispose d’un vaste plateau où la terre est dégradée. Chaque année, l’association pour la sauvegarde des girafes du Niger accompagne les populations de cette zone et entreprend les travaux de confection des demi-lunes forestières. Pour l’année 2024, 3130 demi-lunes forestières ont été confectionnées sur le plateau de Kouré. Hassan Issa, responsable suivi évaluation a expliqué que :« Nous sommes ici sur le plateau de kouré, lieu de refuge des girafes pendant la saison de pluie. Comme on peut le constater le terrain est extrêmement dégradé, c’est pourquoi notre association organise régulièrement des opérations de récupération des terres avec les villageois ».

Deuxième jours des travaux sur le site

Pour ces travaux, l’équipe terrain de l’Association pour la Sauvegarde des girafes a d’abord identifié le site au niveau de la localité, en accord avec les services techniques de kouré et la population bénéficiaire. 436 personnes dont 216 femmes ensuite ont été mobilisées pendant cinq jours sur le site, creusant à la main des fossés d’irrigation traditionnels. La demie lune est réalisée sous forme d’un demi-cercle destiné à recevoir la culture. Sous l’œil vigilant des techniciens qui supervisent les travaux avec l’aide d’un chef chantier, un contrôleur ou pointeur et les autres membres de l’équipe jouent le rôle des traceurs. Munis de leur daba, pioche, pelle, corde, bottes, gants et masques, apport de fumure organique et épandage, chacun s’efforce à réaliser sa partie. Ce sont des courbes de niveau généralement tracées à l’aide d’un levé topographique, puis ouvrent la cuvette de la forme d’un cercle à la pioche et à la pelle. 

Ces ouvrages ont fait l’objet d’épandage, de la fumure organique et de semis à sec des graines de “Balanités aegyptiaca” (NDLR: le dattier du désert) . Une fois la zone labourée, les travailleurs sèment directement des espèces autochtones ligneuses ou herbacées et mettent en terre de jeunes plants. Ces espèces sont, pour la plupart, résilientes et poussent bien sur les terres dégradées. Elles offrent un couvert végétal et améliorent la productivité de terres auparavant dénudées. 

Interrogé, Mana Koudoussou Ibrahim, technicien de recherche senior à l’institut international de recherches sur les cultures (ICRISAT Niger) expliquent que les producteurs pratiquent les demi-lunes pour restaurer les terres dégradées à des fins agricoles (si elles sont cultivées), pastorales (si elles sont ensemencées par des espèces fourragères) ou forestières (si elles sont plantées par des espèces ligneuses). Elles sont réalisées sur des terres indurées et encroûtées, qui ont une pente de 0 à 3% et qui génèrent un important ruissellement. Le but est de provoquer l’infiltration de l’eau et d’améliorer la productivité et cette technique leur offre des avantages: “ les demi-lunes permettent de capter le ruissellement et provoquer l’infiltration. Elles peuvent entraîner une augmentation de la profondeur d’humectation du sol de 20 à 40 cm”,  a-t-il dit . 

Mana Koudoussou soutient que les demi-lunes permettent aux cultures de résister aux poches de sécheresse à travers le maintien de l’humidité du sol et améliorent la fertilité du sol à travers le captage des sédiments et des débris organiques transportés par le vent et le ruissellement. Elles peuvent donner un rendement en grains de mil ou du sorgho de plus 800 kg/ha.

Retour de la végétation

Nous sommes le 24 juin 2024. C’est la période de la saison pluvieuse, quelques semaines après le démarrage des travaux champêtres. Sur le plateau de kouré, les ouvrages réalisés au cours de cette année par l’Association pour la sauvegarde de la girafe du Niger portent bien ses fruits en captant déjà l’eau de ruissellement. « Sur ce site restauré, on voit clairement comment la végétation est restaurée et on y observe des girafes en train de brouter. Cela démontré l’intérêt pour cette espèce les actions de récupération des terres avec le soutien de nos partenaires », montre du doigt, Hassan Issa le responsable de l’association pour la sauvegarde des girafes.

le site récupéré du plateau de kouré après une pluie  ( juin 2024)

Interrogé par le studio Kalangou de la fondation hirondelle en 2021 sur le même sujet, le directeur adjoint de la gestion des terres durables, le Colonel Assouman Garba a indiqué que : « la restauration des terres dégradées est un des moyens pour parvenir à la sécurité alimentaire en agissant sur les facteurs de dégradation des terres qui sont principalement d’ordre climatique et anthropique. Ces techniques ont permis l’amélioration de la fertilité des sols ; l’augmentation de la production agricole ; l’augmentation des revenus des populations de sa zone d’intervention ; la régénération des ressources naturelles, base de la production agro-pastorale ; l’augmentation de la disponibilité en fourrage ». 

Source de revenus pour les villageois

En ramenant à la vie les terres dégradées, les agriculteurs n’ont pas besoin de défricher des terres forestières pour les transformer en terres agricoles et satisfaire ainsi la demande alimentaire de plus en plus importante face à une population croissante au Niger. Le travail de récupération des terres, certes, favorise la restauration du couvert végétal ligneux. Mais au-delà, il améliore les revenus des communautés locales. En effet, le site de Kouré mobilise une forte main-d’œuvre locale, qui chaque jour, contribue à lutter contre le chômage. Daouda Hamza, agriculteur de kouré, marié et père et sept enfants fait partie de l’équipe qui a travaillé sur ce site. « Je me réjouis de participer à ces travaux parce qu’il y a une motivation à la fin. Par jour, nous recevons 2000 FCFA et cet argent qu’on donne permet à beaucoup de chefs de famille de gérer des situations surtout dans ce contexte difficile » témoigne-t-il.

Dans la même optique, le projet a également pour objectif de donner plus de responsabilités aux femmes et de les faire participer davantage à une remise en état à plus grande échelle des terres locales. Pour Hassia Seybou, une autre habitante de kouré, mère de deux enfants, ce programme participe à la résilience de la femme rurale “ Chaque participante travaille comme les hommes pour gagner l’argent afin de contribuer à la gestion de famille. Nous faisons ce travail avec joie car toute la communauté est bénéficiaire”, estime-t-elle.

Des défis de taille

 Les demi-lunes ne sont pas une solution miracle. Selon une étude d’évaluation menée en 2019 au Niger par le Programme d’Appui à l’agriculture productive (PROMAP) et la GIZ auprès des exploitants de terres, la technique ne fait pas face aux catastrophes météorologiques telles que la pluie torrentielle et tempête de vent locale. Selon le technicien de recherche senior à (ICRISAT Niger), Mana Koudoussou Ibrahim, la réalisation des demi-lunes nécessite un temps élevé de travail et une main d’œuvre importante. La norme de réalisation de ces ouvrages est de 2 à 3 demi-lunes par personne par jour. Mieux, les demi-lunes ont un important besoin d’entretien. Après les grosses pluies, il faudrait les visiter pour réparer les brèches et rétablir les bourrelets. Un autre aspect est qu’elles sont seulement applicables sur des terrains indurés et encroûtés. Ce qui limite son adoption dans certaines localités. La production animale peut être réduite parce que les sites sylvo-pastoraux doivent être protégés contre la divagation des animaux dans les 2 à 3 premières années, jusqu’à établissement de la végétation.Un autre problème primordial apparaissant est le défi de la gouvernance. D’abord l’écart entre d’une part la démesure des ambitions prométhéennes et d’autre part la faiblesse des capacités de mise en œuvre. En effet, pour restaurer les terres, le Niger s’est fixé comme objectif au niveau national, la récupération de plus de 200 000 ha/an alors que les niveaux actuels de récupération sont inférieurs à 50 000 hectare/an. Même si les décideurs et les financeurs affichent leur accord sur l’objectif de restauration des terres, le succès des projets repose sur la participation des populations locales. Elle doit se faire alors même que persistent les problèmes d’insécurité, de droits fonciers etc.

Ailleurs en Côte d’Ivoire, régénérer les zones désertes en plantant des arbres. 

En Côte d’Ivoire, 60% du territoire national est touché par la sécheresse et la désertification, et ce taux s’élève à 90% dans la partie nord du pays. La région du Tchologo fait partie des localités où les arbres ont disparu il y a des décennies, laissant place à une vague de chaleur et de sécheresse. Mais aujourd’hui, les communautés locales, soutenues par l’Ong stop désert, régénèrent les zones désertes en plantant des arbres. 

Mars 2024, une chaleur étouffante s’abat sur tout le pays. La température est encore plus élevée à Tchologokaha, un petit village situé à 10 km de Ferkessédougou, au nord de la Côte d’Ivoire.  Tchologokaha est une bourgade calme et paisible.  Seul le chant et les battements d’ailes de quelques oiseaux, viennent troubler la quiétude des habitants de temps en temps. Koné Gnimaton chef du village de Tchologokaha, arrêté à la place centrale du village, là où se tiennent, son regard est dirigé sur le bois sacré du village. Cet endroit, constitué de cases construites en banco est entouré de toutes sortes d’arbres qui se dressent comme un rempart à tout étranger qui veut y pénétrer. Ce que ressent le septuagénaire à cet instant-là, c’est la joie et la fierté.  Il est impossible actuellement de voir l’intérieur de cette forêt qui abrite aussi une biodiversité. Nous sommes en pays sénoufo, et les bois sacrés, des endroits retirés du village où se font la formation initiatique des plus jeunes sont protégés Dans cette localité, l’agriculture et l’agro-industrie sont menacées, provoquant des migrations et des conflits intercommunautaires. 

Des solutions pour atténuer ….

Face à la situation, le gouvernement ivoirien a lancé en mai 2022 à Abidjan lors du Sommet des Chefs d’Etat et de Gouvernement sur la Cop 15. Un programme dénommé “Abidjan Legacy Program ou L’Initiative d’Abidjan » pour restaurer d’ici 2030, 03 millions d’hectares de forêt et à promouvoir “des approches de gestion durable des sols“.  Cet appel du gouvernement à lutter contre l’avancée du désert est bien assimilé à l’ONG stop désert. Mise en place en 2008, l’organisation s’attèle à lutter pleinement contre la désertification. Elle s’associe à toutes les activités qui s’intéressent à la protection de la biodiversité.  Elle met à la disposition des populations de diverses localités du nord de la côte d’ivoire, des plantes tel que l’acacia mangium essence à croissance rapide qui enrichit le sol.   Elle propose également le teck, le mélina, le néré et l’Apki . Ces arbres qui enrichissent le sol, retiennent l’eau et dont les fruits ou le bois permettent aux populations de subvenir à leur besoin.

Au Burkina Faso, privilégier les semences améliorées pour contrer la sécheresse

Au Burkina Faso, d’après les chiffres publiés par la plateforme pour la gestion des risques agricoles (PARM), entre 2015 et 2019, le pays a perdu environ 60 milliards de FCFA de culture par an du fait de la sécheresse. Face au défi de nourrir les Burkinabè dans un contexte d’insécurité et de réduction des terres cultivables, l’Etat a opté pour une politique de vulgarisation des semences améliorées.

Dans la province du Sanmatenga, au centre-nord, l’une des moins nanties en pluviométrie, le riz Orylux 6 révolutionne les rizicultures aménagées autour de points d’eau saisonniers. Grâce à son cycle court et à sa résistance à la sécheresse, c’est une des semences les plus utilisées par les agriculteurs pour améliorer leurs moyens de subsistance.

« Vous venez au mauvais moment. Actuellement, tous nos barrages sont ensablés », nous avait lancé Lassané Ouédraogo, le président de l’union provinciale des producteurs de riz du Sanmatenga , à l’autre bout du fil. Pas donc d’image de champ verdoyant de riz à photographier en ce mois de février. « La période de fraîcheur, n’est pas propice à la culture du riz. Si vous ne récoltez pas avant décembre, vous perdez toute votre production », explique-t-il. Comme son père avant lui, Lassané exploite un champ d’un hectare sur la plaine aménagée du barrage de Louda, à environ 4 km de Kaya, le chef-lieu de la province. C’est avec une pointe de nostalgie dans la voix qu’il se rappelle du temps où le barrage construit en 1957 assurait aux producteurs deux récoltes par saisons. Mais depuis quelques années, le retenu d’eau est victime de l’ensablement et la plaine de 180 hectares aménagée sur ses berges en 1966 est de moins en moins généreuse du fait de son âge. Il n’y a pas que dans le Sanmatenga que les agriculteurs font grise mine.

Avec les effets conjugués des changements climatiques, le Burkina Faso est confronté à une baisse de la pluviométrie, impactant le secteur agricole qui générait 18,5% de son Produit intérieur brut (PIB) en 2022 d’après les chiffres de la Banque mondiale. La situation reste préoccupante et près de 3 millions de personnes vivent en insécurité alimentaire selon un décompte établi en fin d’année 2023 par le système des Nations Unies. 

Dans ces conditions climatiques plus rudes, 1036 producteurs dans la province continuent de travailler la terre au niveau du barrage de Louda pour y tirer leur pitance quotidienne. Environ le tiers préfère cultiver l’Orylux 6 ou FKR84, une variété de riz résiliente aux aléas climatiques pour éviter les pertes totales de production. C’est l’ONG belge “Triasqui a vulgarisé cette nouvelle variété auprès des riziculteurs du Sanmatenga en 2017. Créée en 1964, TRIAS intervient dans une dizaine de pays en soutenant les agriculteurs familiaux et les petits entrepreneurs à travers notamment leur encadrement et la facilitation de leur accès au financement. 

Enquête réalisée par Souleymane Oumarou Brah Souleymane avec le soutien de la CENOZO dans le cadre du projet « Renforcer le journalisme de solutions sur la santé et le développement durable »

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Migration des femmes africaines d’Agadez vers l’Europe : L’espoir d’une vie paisible brisé en fantasme !

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Vaste pays de l’Afrique de l’Ouest, le Niger couvre une superficie de 1.267. 000 km2 dont 2/3 est désertique. Ces dernières années, la question de la migration notamment irrégulière est l’un des défis auxquels le pays est confronté. En effet, le Niger est à la fois un pays d’origine, de transit et de destination de la migration. Le pays partage 5.697 kilomètres de frontières avec ses six voisins dont l’Algérie et la Libye, le plaçant ainsi au centre des mouvements migratoires de l’Afrique surtout de l’ouest et du centre. 

La région d’Agadez située dans le Nord Sud du pays est la capitale cosmopolite où tout candidat à la migration est obligé de séjourner. Selon les données publiées par l’organisation internationale pour les migrations (OIM), entre 2016 et janvier 2025, le Niger a enregistré un nombre total des migrants (entrant et sortant) de l’ordre de 7. 683. 863 personnes. Pour la seule période de janvier 2025, 160.989 migrants sont sortis du pays tandis que 115.175 migrants sont rentrés.  

Cependant, au cours de leur aventure souvent périlleuse, les candidats à la migration sont confrontés à d’énormes obstacles. Entre abandon dans le désert du Sahara, torture et humiliation par les passeurs, beaucoup sont arrêtés, emprisonnés dans les centres de rétention en Algérie ou en Lybie avant d’être expulsés dans le désert à la frontière avec le Niger. Parmi eux, on trouve des femmes, des filles et des enfants mineurs nigériennes et aussi des autres nationalités africaines. Ces migrantes subissent d’énormes difficultés comme les violences sexuelles et basées sur le genre, les abus et exploitation et la traite des personnes. Pourtant, la protection des droits humains surtout des migrantes doit être une préoccupation pour les Etats.   

Si certains migrants ont fui la pauvreté ambiante, le chômage pour chercher une vie meilleure et une opportunité d’emploi notamment en Europe, d’autres pourtant quittent leurs pays d’origine à cause des conflits et des instabilités politiques. Dans la plupart de cas, les récits de ces migrants notamment les femmes, les filles et les mineurs ne sont toujours pas racontés et ou déformés de leurs réalités. D’où la nécessité de donner la parole à ces braves femmes qui bataillent pour mener une vie paisible.  

Malgré les périls : L’idéal c’est l’arrivée à destination ! 

Agadez, la capitale de l’Aïr est une veille ville historique où depuis des années, les migrants, les réfugiés et même les demandeurs d’asile en transit soit en partance pour l’Europe, soit au retour après leur refoulement cohabitent ensemble avec la population locale. Issus de plusieurs nationalités, chaque femme migrante à son propre vécu. Si certaines connaissent les risques et se sont préparées et déterminer à rejoindre l’Europe via la Lybie ou l’Algérie au prix de leurs vies, d’autres en revanche se sont inspirés des histoires des succès racontées des autres migrantes surtout les investissements réalisés au pays d’origine pour entreprendre le voyage.  

Rencontré dans un ghetto, une maison où la plupart des migrants en transit séjournent avec la bénédiction des passeurs, Amélia est une femme d’origine ghanéenne. A peine la trentaine révolue, elle a quitté son pays d’origine, traversant les frontières terrestres des autres pays jusqu’à Agadez au Niger. Les multiples procédures en cours de route ne l’ont pas découragé de poursuivre son rêve : « J’ai longtemps rêvé d’aller vivre en Europe pour tenter ma chance. Je connais beaucoup de ghanéens qui ont réussi dans la migration. Pourquoi dois-je m’empêcher alors que tout est possible dans la vie. Il faut simplement avoir un objectif et se donner tous les moyens de l’atteindre. Déjà en cours de route, j’ai suivi pas mal de problèmes surtout les raquettes ». A la question de savoir si elle est au courant du calvaire et autres altercations au cours du voyage surtout dans les pays magrébins, Amélia répond : « certes, il y a des soucis partout et le plus souvent ce sont ces problèmes au quotidien qui poussent beaucoup des africains à quitter et à s’aventurer dans la migration. Tout de même, certains arrivent à traverser et à réussir en Europe ».  

Tout comme Amélia, Gloria est une jeune fille nigériane qui attend le convoi pour le voyage. « Je n’ai aucune idée de la route. Ce sont mes contacts qui m’ont mise en relation avec les passeurs d’Agadez. Ils sont censés m’amené en terre algérienne et pour le moment j’attends. ». Pour son premier voyager sur l’Algérie, elle fonde beaucoup espoir : « C’est vraiment un rêve. Avant le covid 19, on avait planifié de partir mais la pandémie a chamboulé notre programme. Depuis 2023, avec la reprise des activités sans risque des passeurs, mes contacts m’ont encouragé à les rejoindre. Ça fait dix jours que je suis à Agadez et espère qu’on va bientôt partir ». Es-tu au courant que lors du voyage ou sur place en Algérie, les femmes subissent des violences y compris sexuelles ? Elle me répond : « Celui qui décide d’entreprendre ce genre d’aventure doit s’attendre à tout y compris la mort. Pour moi, ce voyage ne se prépare pas en un seul jour. Il peut y avoir des difficultés mais l’essentiel c’est aller à destination ».  

Si les rêves de Amélia et Gloria, c’est d’aller jusqu’en Europe, l’aventure de la nigérienne Aichatou Issa s’arrête en Algérie : « Nous partons en Algérie pratiquer la mendicité, si vous partez avec des enfants, vous avez la chance de gagner beaucoup d’argent parce que les arabes donnent de l’aumône ». Savez-vous que le voyage est risqué et que vous pouvez perdre votre vie ? « Beaucoup ont perdu la vie dans le désert et même sur place en Algérie. Mais bon, il faut trouver le moyen de vivre. Malgré les difficultés, beaucoup de mes connaissances se sont réalisés dans les zones de Tahoua et Zinder. A chacun son destin et sa chance ». Comment le fonds sont mobilisés ? Aichatou réplique : « tout dépend de la personne. Certaines sont soutenues au niveau de la famille, d’autres vendent leurs biens, et il y a celles qui exercent des petites activités y compris la mendicité à Arlit ou à Agadez pour mobiliser l’argent ».  

Vivre dans l’humiliation : le quotidien des migrants en Lybie et en Algérie ! 

En Algérie comme en Lybie, les migrants africains sont exposés à toute humiliation. S.H témoigne que : « les femmes travaillent dans des maisons en tant qu’aide-ménagère ou garde enfant. Comme vous êtes à leurs services et qu’ils sont les maitres, beaucoup abusent parce que vous n’avez pas le droit de parler ou disons de contester quoi que ça soit. En dehors de la violence psychologique, le plus souvent, les femmes sont forcées sexuellement ». Une pratique abusive dénoncée par le président de l’ONG JMED Hamidou Nanou Nabara « ces pays maghrébins malgré un certain nombre d’engagements internationaux et même l’adoption de la convention relative aux droits des migrants, sur le terrain, on se rend compte qu’ils ne respectent pas du tout les engagements et font des migrants des objets de manipulation pour leurs partenaires ».  

Pire, les femmes, les filles et les mineurs ne sont pas épargnés dans les violences. A.I en est une victime de ces transgressions « En Lybie, il n’y a aucun respect de l’être humain. Torture, abus sexuels, vols…le plus grand risque est que lors de votre détention, ils prennent tous vos biens et puis ils vous forcent à appeler la famille afin de pays la rançon. Beaucoup sont victimes de rançonnage ». 

Pour Abdoul Aziz Chégou, responsable de la JNSDD Aikin Kasa, Coordonnateur de Alarme Phone Sahara, la plupart sont arrêtés lors des enlèvements sur le terrain ou leurs lieux de travail : « A l’issue de rafles, les économies sont arrachées en même temps que les objets de valeur tels que des vêtements, des appareils électroniques, des articles de valeur, etc. pour le seul fait d’avoir mis pieds dans un territoire dont la personne n’est pas originaire. Ces genres de traitement à la limite trop subjectifs sont à n’en point douter contraires aux principes de respect de droits humains contenus dans des instruments juridiques de portées nationale, sous régionale et même mondiale. Cela donne la sensation de chair de poule à toute personne dotée de bon sens et renvoie à des souvenirs amers remontant à des époques à jamais révolues ». Pour lui de tout temps, l’être humain a voyagé et cela ne doit pas être une contrainte : « Il suffit juste de parcourir des documents d’histoire pour se rendre compte qu’il y a quelques décennies de cela le plus gros des mouvements d’êtres humains se faisaient des autres continents vers l’Afrique ou de la partie septentrionale du continent africain vers le sud. Aujourd’hui, il est aberrant que ce soit une population composée majoritairement de jeunes, d’adolescents et d’enfants qui subissent le poids du racisme et de la maltraitance sous diverses formes comme si les autochtones de ces pays ne voyagent pas au-delà de leurs frontières nationales. Quoi que l’on dise, le déplacement de l’être humain sur la terre date de millions d’années. L’Homme a depuis son apparition sur terre eu les faveurs de se mouvoir par l’usage de ses membres dont il a été doté, à dos d’animaux ou grâce au progrès techniques et technologiques que ce soit sur terre, en mer ou dans l’espace. Quel qu’en soit le reproche que l’on puisse faire à un être humain, la violation de ses droits doit être bannie ».    

Le refoulement des migrants brise l’aventure des migrants ! 

Malgré l’accord bilatéral entre le Niger et certains pays comme l’Algérie, ce pays continu de refouler les migrants ouest africains vers la frontière avec le Niger. « Dans ma vie, je n’ai jamais pensé qu’un être humain peut maltraiter son prochain de la façon dont nous avons été malmenés. Imaginez, en dehors des violences psychiques, nous avons été abandonnés comme de mal propre en plein désert, sans eau ni nourriture » a affirmé S.A 

Ce témoigne ne surprend guère, le responsable de l’ONG Alarme Phone Sahara, qui en 2024, a recensé un nombre record des migrants expulsés d’Algérie vers le Niger. Ce nombre dépasse de loin toutes les statistiques des années précédentes. « Les assistances que nous faisons aux refoulés sont diverses et varient selon les besoins réels que nous constatons sur le terrain à Assamaka, à Arlit, à Agadez et à Niamey. Les mêmes personnes peuvent être assistées sur plus d’un besoin à la fois. Nous pouvons sensibiliser ou conseiller ou même offrir de l’aide sous forme de transport, de référencement ou de fois de rations alimentaires ou faciliter la communication entre elles et leurs proches. A travers cette multitude d’activités, nous pouvons dire que nous avons touché plus de 31.000 personnes de janvier à décembre 2024 comme nous l’avons publié dans notre rapport de fin d’année 2024 » a indiqué Abdoul Aziz Chegou Coordonnateur de Alarme Phone Sahara.  

L’organisation internationale pour les migrations a aussi mis en place un système d’assistance aux migrants. Selon les données consultées dans son bulletin mensuel « Infosheet- Niger, janvier 2025 », l’organisation a fourni une assistance directe aux migrants en transit dans les sept centres. 

Sur la période de 2016 à janvier 2025, on peut retenir : 

Année  Nombre 
2016 6248 
2017 9099 
2018 20 056 
2019 18 534 
2020 10059 
2021 12 137 
2022 17 145 
2023 15 067 
2024 15 781 
2025 477  

Ces organisations travaillent au quotidien avec les services de l’état civil et de la migration pour assister secours à ces migrants en détresse. Cependant, l’expulsion et la maltraitance ne désamorcent pas certaines : « Mon rêve est écourté mais je reste convaincue que mon jour viendra. Pour le moment, je n’ai aucune intention de retourner au pays. Je reste travailler soit à Agadez ou dans une autre localité du Niger pour mobiliser le fonds nécessaire » affirme Emmanuella. 

Ce genre d’engagement et de détermination amène le coordonnateur de Alarme Phone Sahara à s’interroger sur les raisons de cette aventure « « Je profite pour demander à tous les africains de quelque pays, de quelque race ou ethnie, de quelque religion et de quelque origine sociale à s’interroger sur les raisons de la désertion des bras valides des contrées et des centres urbains vers d’autres cieux. Pour ma part, je peux citer entre autres causes l’acculturation, l’inadaptation de systèmes éducatifs, la mauvaise gouvernance, l’injustice, l’accaparement des terres productives, le terrorisme savamment développé, la mauvaise identification de projets de développement, le complexe d’infériorité, le manque de considération de compétences locales autodidactes, l’inadéquation profil-emploi dans tous les secteurs sociaux, l’égoïsme, le tribalisme, le clanisme, la contusion, la corruption et le passe-droit ».     

Pour Manou Hamidou Nabara de l’ONG JMED, « la situation critique de la jeunesse surtout le chômage combiné a un certain radicalisme de certains migrants sont autant d’éléments qui les poussent à s’engager avec la ferme conviction qu’ils vont réussir comme certains de leurs compatriotes ».  

L’apport des migrants dans l’économie de leurs pays d’origine 

Il est vrai que la migration à ses côtés négatifs mais la majeure partie des migrants contribuent au développement de leurs pays d’origine. Selon les statistiques de la Banque Mondiale, les remises migratoires à destination de l’Afrique subsaharienne ont augmenté de 6,1% en 2022 pour atteindre 53 milliards de dollars. Dans des pays comme le Sénégal, le Nigéria et le Mali, les migrants participent au développement du pays. 

« Derrière chaque migrant se cache plusieurs individus. Dans certaines communautés, ce n’est plus une histoire de personne mais plutôt de famille. Et vous vous êtes surpris de voir qu’en cas des problèmes, les familles se débrouillent pour sauver nos vies. En effet, chaque migrant prend en charge un important réseau familial dans son pays d’origine grâce au transfert des fonds » indique avec une certaine fierté et un soulagement F. K, une migrante de nationalité camerounaise.  

Beaucoup d’études ont démontré que la migration peut aussi être bénéfique pour la femme en ce sens qu’elle peut avoir une expérience positive et d’améliorer ses conditions de vie. Si elle apprend un métier, elle peut mettre en place une entreprise, créer de l’emploi et renforcer son autonomie. Aussi, vivre dans un autre pays, peut l’amener à avoir des expériences positives. « Certaines de mes compatriotes avec qui nous étions ensemble ont accepté le retour volontaire de l’OIM. Certes, il n’est pas dit qu’il faut nécessairement aller en Europe pour réussir mais seulement les conditions de vie et de travail ne sont pas les mêmes. Aussi, les opportunités pour toutes les catégories. Pour moi, en étant en Europe, c’est plus facile de gagner sa vie et de soutenir les autres » estime Amelia.  

La question de la migration irrégulière des femmes est un sujet qui demeure d’actualité puisqu’elles sont en quête de voyager et surtout parmi les expulsés. Pourtant au-delà de la protection de leurs droits dans un contexte des violences, il y a lieu de continuer à travailler et assurer l’effectivité des droits de chaque citoyen. Cela relance le débat au moment où les autorités nigériennes ont à travers l’ordonnance 2023-16 du 25 novembre 2023 abrogé la loi 2015-36 portant criminalisation de certaines activités liées à la migration irrégulière. 

A Agadez, l’on remarque que les activités de la migration ont lentement repris mais sans atteindre son développement d’antan qui jadis donnait un réel espoir à ses acteurs.  

Ce reportage a été réalisé par Souleymane Oumarou Brah dans le cadre du projet Informa, soutenu par l’Union Européenne. 

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Entretien du ministre de l’Agriculture et de l’Elevage sur la RTN: Au-delà de la maitrise de son cahier des charges, Mahaman Elhadj Ousmane confirme que l’autosuffisance alimentaire est réalisable !

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Le lundi 10 février 2025, c’est autour du ministre de l’Agriculture et de l’élevage, le Colonel Mahaman Elhadj Ousmane de présenter aux nigériens les résultats de son travail des dix-huit mois (18) mois à la tête de ce ministère stratégique. Au cours de cet exercice de redevabilité, il a décliné point par point les axes de son cahier des charges, tout en rappelant le contexte difficile dû aux sanctions de la communauté internationale contre le Niger avant de présenter les résultats et les perspectives.

Secteur clé de notre économie nationale, l’agriculture et l’élevage sont les principales activités de la population nigérienne. Dans le contexte de la refondation nationale prôné par le CNSP, il est impératif de garantir l’autosuffisance alimentaire et aussi faire de ce secteur les piliers économique et social de notre pays. C’est dans cet esprit que le Président du Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie (CNSP), le Chef de l’Etat, le Général de Brigade Abdourahamane Tiani a confié au lendemain des évènements du 26 juillet 2023, la gestion de ce ministère au Colonel Ousmane Elhadj Ibrahim.

Sa prestation d’une haute facture a montré que l’homme connait et maitrise son domaine car il a mis en lumière une vision stratégique des autorités de faire de la souveraineté alimentaire une réalité. « Sur les 18500 hectares d’aménagements hydro agricoles pour 1267000km2 que nous disposons, avec les potentialités irrigables que nous avons et près de 27 millions d’habitants, nous avons à peine 8500 hectares qui sont véritablement pratiqué en double saison ». D’où la la mise en œuvre du programme des grandes irrigations par l’ONAHA à travers le programme de résilience pour la sauvegarde de la patrie. Dans cette optique, il a indiqué que « l’ONAHA a eu dans ce cadre 3.700 hectares jusqu’en 2027 pour réhabiliter et de nouveaux 8000 hectares à réhabiliter sur la même période ».

Pour ce faire, les autorités ont ramené à la CAIMA ses prérogatives. Avec la mise en place d’une industrie de production d’engrais, le Niger va économiser en termes d’achat et de subvention aux producteurs mais aussi fera en sorte qu’il est la disponibilité et la diversification des unités de production d’engrais organique.

L’autre aspect est le retour des jeunes à la terre. Sur ce point, le Ministre a évoqué l’accès à la terre en lien avec les conflits fonciers et le problème de financement pour les entrepreneurs au niveau des banques. A ce niveau, il faut une véritable réforme de ce secteur, investir et soutenir les initiatives tout en pensant à une approche agroécologique. La synergie d’action entre les différentes composantes agropastorales, environnementales et socio-économiques est plus que jamais nécessaire.

S’agissant de la recherche et de l’encadrement, l’institut national de la recherche agronomique (IRAN) aura les moyens nécessaires pour mener ses activités. Pour l’encadrement avec les besoins indiqué par le ministre, l’Etat doit engager un programme spécial pour recruter les jeunes diplômés.

En somme, l’entretien du ministre de l’Agriculture et de l’élevage sur la radiotélévision nationale montre qu’il y a une volonté politique de relever les défis actuels et de créer des nouvelles initiatives pouvant permettre de renforcer le secteur pastoral et agricole. Il revient maintenant aux nigériens de travailler et surtout de retourner à la terre.

Souleymane Brah

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