Le mardi 26 décembre 2023, l’ONG internationale Action Contre la Faim (ACF) a organisé à Maradi une table ronde sur les défis liés à la situation humanitaire dans ladite région et l’analyse des facteurs liés au grand banditisme armé et aux défis sécuritaires dans la bande sud-ouest de Maradi. L’activité a enregistré la participation du gouverneur, le Contrôleur Général de Police Mamane Issoufou, en présence du Secrétaire Général Adjoint du Gouvernorat, du Président du Conseil de ville, du Président du Conseil régional, les préfets et Maires de Guidan Roumji, Madarounfa, Dakoro, Mayahi et Bermo ainsi que les responsables des services techniques, des forces de défense et de sécurité et des organisations humanitaires intervenants dans la région de Maradi.
Pour Action Contre la Faim, dans ce contexte où la région de Maradi est confrontée à des défis liés aux mouvements de populations, entraînant du coup l’afflux des réfugiés mais aussi et surtout l’insécurité alimentaire, les inondations, les épidémies et le banditisme, il y a la nécessite de mobiliser l’ensemble des parties prenantes autour d’une table pour discuter des défis à relever face à la situation de l’insécurité alimentaire d’une part de faire le suivi des avancées et des contraintes liés à l’accès d’autre part.
Modéré par Djaffra Traoré, Directeur Pays par intérim, le premier panel axé sur « les défis liés à la situation humanitaire dans la région de Maradi » a été co-animé par les directions de l’Action Humanitaire et de la gestion des catastrophes, de l’Agriculture et l’Élevage et la coordination régionale de OCHA. Il ressort des exposés de différents panelistes que cette situation a engendré l’augmentation des besoins en matière de sécurité alimentaire et de nutrition, dont les réponses ont été confrontées à des contraintes de financement durables. Pire, les agriculteurs et éleveurs sont une cible délibérée des acteurs armés. Ils le sont, car perçus comme ayant des ressources qui peuvent être pillées et/ou utilisées par les groupes armés. Pour preuve, les assassinats, extorsions, vols et menaces sont rapportés avec une grande fréquence, empêchant le libre mouvement des populations dans la région.
Par ailleurs, il a été relevé que la campagne agricole 2023 a connu un démarrage précoce (2ème décade d’avril) comparée à 2022 et aux 5 dernières années. En situation normale, dans la région de Maradi 325 282 personnes sont affectées et ont besoin d’une assistance immédiate pour sauver leurs vies et protéger leurs moyens d’existence. Si rien n’est fait, la situation risque d’impacter 499 862 personnes en juin, juillet et août 2024.
Le second panel animé par le Directeur régional de la police, président du Comité de Sécurité Régional a porté sur le thème : « Analyse des facteurs liés au grand banditisme armé et aux défis sécuritaires dans la bande sud-ouest de Maradi ».
Dans son exposé, le directeur régional a expliqué que dans le sud de la région de Maradi, la criminalité transfrontalière, en provenance du Nigeria se poursuit à l’encontre des populations locales. Les modes opératoires restent pour l’instant les mêmes, avec des agresseurs, souvent à moto et équipés d’armes modernes, menant leurs actions principalement de manière nocturne et n’hésitant pas à user de violence en cas de résistance des victimes. L’activité des criminels se concentre toujours sur le vol de bétails (58%) et les enlèvements contre rançons (21%). Selon le DRPN, l’insécurité grandissante est la cause de l’imposition des restrictions de mouvements aux ONG afin de les protéger contre des attaques, réduisant ainsi de manière significative les mouvements.
Au regard de toutes ces préoccupations, les participants ont formulé des recommandations à l’endroit des autorités de créer les conditions pour une sécurisation à négocier avec les acteurs militaires, d’étudier les possibilités de la mise en œuvre deprojets à impact rapide (QUIPS), d’anticiper une assistance alimentaire et nutritionnelle immédiate aux personnes en urgence et crise alimentaire et la mise en place d’un cadre commun de coordination des acteurs humanitaires pour une réponse concertée.
S’agissant de la situation sécuritaire, les participants à la table ronde ont souhaité mettre à contribution les polices de proximités/tout mécanismes permettant de faire un suivi/identification des personnes mal intentionnées et aussi des mécanismes permettant une meilleure collaboration/participation aux efforts de sécurisation des communautés (meilleure collaboration avec les FDS) et enfin de créer les conditions de dialogues intracommunautaires et intercommunautaires et avec les autres acteurs (humanitaires, FDS).
La table ronde de Maradi se tient opportunément dans un contexte particulier pour le pays. De nouveaux acteurs en présence avec qui, il faut désormais compter et consolider. Rappelons qu’Action contre la Faim est présente au Niger depuis 1997. Cette ONG mène un travail de plaidoyer en faveur d’un environnement favorable à la sécurité alimentaire et nutritionnelle et d’une meilleure réponse aux besoins d’accès à l’eau et aux situations d’urgence. Dans cette optique, elle accompagne la consolidation et la mise en œuvre du cadre politique et institutionnel et surtout documente les réalités humanitaires du Niger. Également, ACF contribue à une opérationnalisation du nexus sensible à l’aide humanitaire dans les zones fragiles ainsi que des interventions multi-annuels et flexible. De par sa position et le rôle qu’elle joue, ACF est une des ONGs qui participe activement au groupe restreint chargé du suivi de la mise en œuvre de la Politique nationale de l’action humanitaire et de son plan d’action.
Souleymane BRAH